mardi 18 janvier 2011

Eric Harder : Adieu l'ami


Chantre des médecines douces, il avait pourtant un avis tranché sur la plupart des domaines, surtout ceux liés au cyclisme et à sa pratique. En cela, Eric Harder savait de quoi il parlait. Pour l'avoir fréquenté à plusieurs reprises lors de stages d'entraînement ou lors de cyclo-sportives, le savoir à ses côtés avait quelque chose de rassurant. Par sa simplicité et son assurance, il avait le don de mettre ses proches en confiance.

Je l'avais interviewé il y a tout juste 20 ans pour les 100 ans de l'UVG (1). Il ne cachait pas sa principale fierté, celle d'avoir remporté le GP de Lausanne 84, après 120 km d'échappée, dont une grande partie seul pour finir en solitaire devant un peloton abusé.

Pygmalion pour les uns, conseiller pour d'autres, Eric ne gardait pas son savoir, il aimait à le partager. Pour cela il fallait savoir prendre le temps de l'écouter et surtout comprendre. J'appréciais chez lui cette rigueur intellectuelle, bâtie sur des raisonnements. Sachant user de finesse ou de justesse lors de toute appréciation, Eric savait aussi faire preuve de compassion, une qualité rare qui lui vaut aujourd'hui toute notre sympathie.
William Fracheboud



Eric Harder, surnommé ‘le vieux’ par les proches du vélo, nous a quitté samedi dernier après une année de souffrance. J'ai eu à plusieurs reprises des contacts avec lui durant les derniers mois de sa maladie et j’ai pu me rendre compte de la souffrance et du combat qu'il a mené pour vivre le plus longtemps possible. Il y croyait encore, il y a peu. Pour preuve, il était venu me trouver en novembre pour engager des travaux importants dans sa maison en me disant qu'il se sentait assez fort pour les suivre jusqu'à leurs termes.

J'ai connu Eric alors qu'il était le Président du VCF (2). Il portait alors un maillot qui faisait envie, c’était au début des années 80. Il était alors le roi des courses par handicap (mixité des catégories) car c'était un sportif sur le tard et il savait utiliser son expérience et ses méthodes de préparation à bon escient. Sa plus grande victoire, il l'a remportée au Grand Prix de Lausanne en battant les pros, notamment Daniel Gisiger.

Eric était aussi en avance concernant les méthodes de préparation sportive. On se souvient de cet appareil bizarre qu'il avait installé sur son vélo et qui lui permettait de connaitre son rythme cardiaque ; pour beaucoup, il était un extraterrestre. Mais n'a-t-il pas aidé dans leur préparation des grands coureurs comme Pascal Richard ou Bruno Boscardin.

Il a été l'organisateur du Tour du Canton pendant plusieurs années, épreuve mythique du calendrier genevois et national. Chaque compétiteur, moi compris, rêvait de participer à ce genre d'épreuve et de pouvoir côtoyer les pros. Plus tard, lorsqu'il m'a demandé de reprendre cette organisation, je me suis senti très fier d’obtenir sa confiance. Pour cette organisation, je me suis appuyé sur ses connaissances, comme je l’ai fait pour mes méthodes d'entrainement.

Je peux dire qu'il a été pour moi un guide, autant dans le sport que dans la vie où Eric était un puits de science dans lequel je n’avais qu’à me servir. Une opportunité rare qui m’a été utile et qui m'a permis de progresser dans ce sport.

Eric a remplit sa vie, il me disait ne pas avoir peur de mourir tout en sachant que les derniers jours seraient difficiles, ce qui a été le cas. Des hommes de sa trempe ne s’oublient pas, il laisse une empreinte indélébile dans notre monde en manque de spiritualité et de sagesse. Il va nous manquer, il va me manquer.
Paul Eugster, dit Paulo comme il aimait à m'appeler.
_______________
(1) UVG, 100 ans de cyclisme, 1991.
(2) Vélo-Club Français, ancien club genevois.
Photo : collection bikeinlove (Carpentras, 2004)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire